Page:Maupassant - Mont-Oriol, éd. Conard, 1910.djvu/308

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vous négliger pendant quelques jours. On fait moins de frais pour les amis que pour les autres, vous savez.

Et il disait à l’aînée :

— Vous, je veux vous séduire, mademoiselle, et je vous préviens en ennemi loyal. Je vous ferai même la cour. Ah ! vous rougissez, c’est bon signe. Vous verrez que je suis gentil, quand je m’en donne la peine. N’est-ce pas, mademoiselle Charlotte ? Et elles rougissaient en effet toutes les deux ; et Louise balbutiait de son air grave :

— Oh ! monsieur, comme vous êtes fou !

Il répondait :

— Bah ! vous en entendrez bien d’autres plus tard, dans le monde, quand vous serez mariée, ce qui ne tardera pas. C’est alors qu’on vous en fera, des compliments !

Christiane et Paul Brétigny l’approuvaient d’avoir ramené Louise Oriol ; le marquis souriait, amusé par ce marivaudage enfantin ; Andermatt pensait : « Pas bête, le gaillard. » Et Gontran, irrité du rôle qu’il lui fallait jouer, porté par ses sens vers Charlotte et par son intérêt vers Louise, murmurait entre ses dents, avec des sourires pour celle-ci : « Ah ! ton gredin de père a cru me jouer ; mais je vais te mener tambour battant, ma petite ; et tu verras si je m’y prends bien. »