Page:Maupassant - Mont-Oriol, éd. Conard, 1910.djvu/37

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ses jours à boire les consommations destinées aux baigneurs. Il portait une immense moustache d’officier, trempée du matin au soir dans l’écume des bocks et le sirop poisseux des liqueurs ; et il avait déterminé, chez le vieux comique recruté par lui, une passion immodérée pour le billard.

À peine levés, ils se mettaient à leur partie, s’injuriaient, se menaçaient, effaçaient les points, recommençaient, prenaient à peine le temps de déjeuner et ne toléraient pas que deux clients vinssent les chasser de leur tapis vert.

Ils avaient donc fait fuir tout le monde, et ne trouvaient point la vie désagréable, bien que la faillite attendît Petrus Martel en fin de saison.

La caissière, accablée, regardait du matin au soir cette partie interminable, écoutait du matin au soir cette discussion sans fin et portait du matin au soir des chopes ou des petits verres aux deux joueurs infatigables.

Mais Gontran entraîna sa sœur :

— Viens dans le parc. C’est plus frais.

Au bout de l’établissement, ils aperçurent soudain l’orchestre sous un kiosque chinois.

Un jeune homme blond, jouant du violon avec frénésie, gouvernait, au moyen de la tête, de ses cheveux agités en mesure, de tout