Page:Maupassant - Mont-Oriol, éd. Conard, 1910.djvu/92

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l’avait vu, non pas une fois, mais cinquante, tendre des collets, ses béquilles sous le bras.

Et le vieil Oriol s’arrêta en face du vieux vagabond, l’esprit frappé par une idée encore confuse, car les conceptions étaient lentes dans sa tête carrée d’Auvergnat.

Il lui dit bonjour ; l’autre répondit bonjour. Puis ils parlèrent du temps, de la vigne fleurie, de deux ou trois choses encore ; mais comme Colosse avait pris de l’avance, son père le rejoignit à grands pas.

Leur source coulait toujours, claire maintenant, et tout le fond du trou était rouge, d’un beau rouge foncé, venu d’un abondant dépôt de fer.

Les deux hommes se regardèrent souriants, puis ils se mirent à nettoyer les alentours, à enlever les pierres dont ils firent un tas. Et ayant trouvé les derniers débris du chien mort, il les enterrèrent en plaisantant. Mais soudain le vieil Oriol laissa tomber sa bêche. Un pli malin de joie et de triomphe rida les coins de sa lèvre plate et les bords de son œil sournois ; et il dit au fils :

— Viens-t’en, pour voir.

L’autre obéit ; ils regagnèrent la route et revinrent sur leurs pas. Le père Clovis chauffait toujours au soleil ses membres et ses béquilles.