Page:Maupassant - Mont-Oriol, 1887.djvu/115

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Mais peu à peu cette candeur même l’avait amusé, et puis séduit ; et, cédant à sa nature entraînable, il avait commencé à entourer de soins attendris la jeune femme.

Il savait bien que le meilleur moyen de troubler une âme pure était de lui parler sans cesse d’amour, en ayant l’air de songer aux autres ; et, se prêtant alors avec astuce à la curiosité friande qu’il avait éveillée en elle, il s’était mis, sous prétexte de confidences, à lui faire sous l’ombre des bois un véritable cours de passion.

Il s’amusait, comme elle, à ce jeu, lui montrait par toutes les menues attentions que savent trouver les hommes, le goût grandissant qu’il avait pour elle, et se posait en amoureux sans se douter encore qu’il le deviendrait vraiment.

Ils faisaient cela, l’un et l’autre, tout le long des lentes promenades aussi naturellement qu’il est naturel de prendre un bain quand on se trouve, par un jour chaud, au bord d’une rivière.

Mais à partir du moment où la vraie coquetterie se déclara chez Christiane, à partir de l’heure où elle découvrit toutes les adresses natives de la femme pour séduire les hommes, où elle se mit en tête de jeter à ses genoux ce passionné, comme elle aurait entrepris de gagner une partie de croket, il se laissa prendre, ce roué candide, aux mines de cette innocente, et il commença à l’aimer.

Alors il devint gauche, inquiet, nerveux ; et elle le traita comme un chat fait d’une souris.