Page:Maupassant - Mont-Oriol, 1887.djvu/186

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— Écoute, chéri, il s’agit de bien nous entendre et de ne pas commettre d’imprudences ni de fautes. D’abord, es-tu sûr de tes domestiques ? Ce qu’il y a de plus à craindre c’est une dénonciation, une lettre anonyme à mon mari. De lui-même il ne devinera rien. Je connais bien William…

Ce nom, deux fois répété, irrita tout à coup le cœur de Paul. Il dit, nerveux :

— Oh ! ne me parle pas de lui ce soir !

Elle s’étonna :

— Pourquoi ? Il le faut bien pourtant… Oh ! je t’assure qu’il ne tient guère à moi.

Elle avait deviné sa pensée.

Une obscure jalousie, encore inconsciente, s’éveillait en lui. Et soudain, s’agenouillant et lui prenant les mains :

« Écoute, Liane !… » - il se tut. Il n’osait pas dire l’inquiétude, le soupçon honteux qui lui venaient ; et il ne savait comment les exprimer.

— Écoute… Liane… Comment es-tu avec lui ?…

Elle ne comprit pas.

— Mais… mais… très bien..

— Oui… je sais… Mais… écoute… comprends-moi bien… C’est… c’est ton mari… enfin… et… et… tu ne sais pas combien je pense à ça depuis tantôt… Combien ça me tourmente… ça me torture… Tu comprends… dis ?

Elle hésita quelques secondes, puis soudain elle pénétra son intention tout entière, et avec un élan de franchise indignée :