Page:Maupassant - Mont-Oriol, 1887.djvu/259

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— Mais rien, Monsieur, rien de rien ! Qu’est-ce qui vous a fait croire ça ?

— Mais tout, Mademoiselle, tout de tout ! Vous ne venez plus ici, vous ne venez plus dans l’arche de Noé (il avait ainsi baptisé le grand landau). Vous prenez des airs revêches quand je vous rencontre et quand je vous parle.

— Mais non, Monsieur, je vous assure.

— Mais oui, Mam’zelle, je vous l’affirme. En tout cas je ne veux point que cela dure et je vais signer la paix avec vous, aujourd’hui même. Oh ! vous savez, je suis entêté, moi. Vous aurez beau me faire grise mine, je saurai bien venir à bout de ces manières-là et vous forcer à devenir gracieuse avec nous comme votre sœur, qui est un ange de gentillesse.

On annonça le dîner servi et ils passèrent dans la salle à manger. Gontran prit le bras de Louise.

Il fut plein d’attentions pour elle et pour sa sœur, partageant ses compliments avec un tact admirable, disant à la cadette :

— Vous, vous êtes notre camarade, je vais vous négliger pendant quelques jours. On fait moins de frais pour les amis que pour les autres, vous savez.

Et il disait à l’aînée :

— Vous, je veux vous séduire, Mademoiselle, et je vous préviens en ennemi loyal. Je vous ferai même la cour. Ah ! vous rougissez, c’est bon signe. Vous verrez que je suis très gentil quand je m’en donne la peine. N’est-ce pas, mademoiselle Charlotte ?