Page:Maupassant - Mont-Oriol, 1887.djvu/270

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cueillir des femmes, de faire parler d’eux et de trouver de l’argent par tous les moyens possibles.

Comme ils ne savaient rien que les scandales de la veille, les échos des alcôves et des écuries, les duels et les histoires de jeux, tout l’horizon de leur pensée était fermé par ces murailles.

Ils avaient eu toutes les femmes cotées sur le marché galant, se les étaient passées, se les étaient cédées, se les étaient prêtées, et causaient entre eux de leurs mérites amoureux comme des qualités d’un cheval de courses. Ils fréquentaient aussi le monde bruyant et titré dont on parle, et dont les femmes, presque toutes, entretenaient des liaisons connues, sous l’œil indiffèrent, ou détourné, ou fermé, ou peu clairvoyant du mari ; et ils les jugeaient, ces femmes, comme les autres, les confondaient dans leur estime, tout en établissant une légère différence due à la naissance et au rang social.

A force d’employer des ruses pour trouver l’argent nécessaire à leur vie, de tromper les usuriers, d’emprunter de tous côtés, d’éconduire les fournisseurs, de rire au nez du tailleur apportant tous les six mois une note grossie de trois mille francs, d’entendre les filles conter leurs roueries de femelles avides, de voir tricher dans les cercles, de se savoir, de se sentir volés eux-mêmes par tout le monde, par les domestiques, les marchands, les grands restaurateurs et autres, de connaître et de mettre la main dans certains tripotages de bourse ou d’af-