Page:Maupassant - Mont-Oriol, 1887.djvu/287

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ami je… je te ferais voir que j’ai l’humeur courte. Un mot de plus et c’est fini entre nous, pour toujours.

Puis, pesant ses paroles, lentement, et les lui jetant au visage :

— Je n’ai pas d’explications à te donner… j’en pourrais avoir plutôt à te demander… Ce qui n’est ni d’un galant homme, ni d’un honnête homme, c’est une sorte d indélicatesse… qui peut avoir bien des formes… dont l’amitié devrait garder certaines gens… et que l’amour n’excuse pas…

Soudain, changeant de ton et badinant presque :

— Quant à cette petite Charlotte, si elle t’attendrit et si elle te plaît, prends-la, et épouse-la. Le mariage est souvent une solution dans les cas difficiles. C’est une solution et une place forte dans laquelle on se barricade contre les désespoirs tenaces… Elle est jolie et riche !… Il faudra bien que tu finisses par cet accident-là… Ce serait amusant de nous marier, ici, le même jour, car moi j’épouserai l’aînée. Je te le dis en secret, ne le répète pas encore… Maintenant, n’oublie point que tu as le droit, moins que personne, toi, de parler jamais de probité sentimentale et de scrupules d’affection. Et maintenant retourne à tes affaires. Je vais aux miennes. Bonsoir.

Et changeant brusquement de chemin il descendit vers le village. Paul Brétigny, l’esprit hésitant et le cœur troublé, revint à pas lents vers l’hôtel du Mont-Oriol.