Page:Maupassant - Mont-Oriol, 1887.djvu/326

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par une seule poussée de l’étreinte de l’Auvergnat, et le collant au mur :

— Écoutez, père Oriol, il ne s’agit pas de nous battre, mais de nous entendre. J’ai embrassé votre fille, c’est vrai… Je vous jure que c’est la première fois… et je vous jure aussi que je veux l’épouser.

Le vieux, dont la fureur physique était tombée sous le choc de son adversaire, mais dont la colère ne se calmait point, bredouillait :

— Ah ! ch’est cha ! On vient voler cha fille, on veut chon argent… Bougrrre de trompeur…

Alors, tout ce qu’il avait sur le cœur s’échappa en paroles nombreuses et désolées. Il ne se consolait pas de la dot promise à l’aînée, de ses vignes allant aux mains de ces Parigiens. Il soupçonnait à présent la misère de Gontran, l’astuce d’Andermatt, et, oubliant la fortune inespérée que le banquier lui apportait, il répandait sa bile et toute sa rancune secrète contre ces malfaisants qui ne le laissaient plus dormir en paix.

On eût dit qu’Andermatt, sa famille et ses amis, venaient chaque nuit le dévaliser, lui voler quelque chose, ses terres, ses sources et ses filles.

Et il jetait ses reproches dans la figure de Paul, l’accusant aussi d’en vouloir à son bien, d’être un fripon, de prendre Charlotte pour avoir ses champs.

L’autre, impatienté bientôt, lui cria sous le nez :

— Mais je suis plus riche que vous, nom d’un chien de vieille bourrique. Je vous en donnerais, de l’argent…