Page:Maupassant - Pierre et Jean, Ollendorff, 1888.djvu/240

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— Voilà longtemps que je te sais jaloux de moi, depuis le jour où tu as commencé à dire « la veuve » parce que tu as compris que cela me faisait mal.

Pierre poussa un de ces rires stridents et méprisants qui lui étaient familiers :

— Ah ! ah ! mon Dieu ! Jaloux de toi !… moi ?… moi ?… moi ?… et de quoi ?… de quoi, mon Dieu ?… de ta figure ou de ton esprit ?…

Mais Jean sentit bien qu’il avait touché la plaie de cette âme.

— Oui, tu es jaloux de moi, et jaloux depuis l’enfance ; et tu es devenu furieux quand tu as vu que cette femme me préférait et qu’elle ne voulait pas de toi.

Pierre bégayait, exaspéré de cette supposition :

— Moi… moi… jaloux de toi ? à cause de cette cruche, de cette dinde, de cette oie grasse ?…

Jean qui voyait porter ses coups reprit :

— Et le jour où tu as essayé de ramer plus fort que moi, dans la Perle ? Et tout ce que tu