Page:Maupassant - Pierre et Jean, Ollendorff, 1888.djvu/316

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— Qu’est-ce que je vous avais promis, hein ? Est-ce que je connais leur route ?

Jean, tout bas, dit à sa mère :

— Regarde, maman, elle approche.

Et Mme Roland découvrit ses yeux aveuglés par les larmes.

La Lorraine arrivait, lancée à toute vitesse dès sa sortie du port, par ce beau temps clair, calme. Beausire, la lunette braquée, annonça :

— Attention ! M. Pierre est à l’arrière, tout seul, bien en vue. Attention !

Haut comme une montagne et rapide comme un train, le navire, maintenant, passait presque à toucher la Perle.

Et Mme Roland, éperdue, affolée, tendit les bras vers lui, et elle vit son fils, son fils Pierre, coiffé de sa casquette galonnée, qui lui jetait à deux mains des baisers d’adieu.

Mais il s’en allait, il fuyait, disparaissait, devenu déjà tout petit, effacé comme une tache imperceptible sur le gigantesque bâtiment. Elle s’efforçait de le reconnaître encore et ne le distinguait plus.