Page:Maupassant - Pierre et Jean, Ollendorff, 1888.djvu/80

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Personne ne pouvait parler ; on avait trop à penser, et rien à dire. Seule Mme Roland cherchait des phrases banales. Elle raconta la partie de pêche, fit l’éloge de la Perle et de Mme Rosémilly.

— Charmante, charmante, répétait le notaire.

Roland, les reins appuyés au marbre de la cheminée, comme en hiver, quand le feu brûle, les mains dans ses poches et les lèvres remuantes comme pour siffler, ne pouvait plus tenir en place, torturé du désir impérieux de laisser sortir toute sa joie.

Les deux frères, en deux fauteuils pareils, les jambes croisées de la même façon, à droite et à gauche du guéridon central, regardaient fixement devant eux, en des attitudes semblables, pleines d’expressions différentes.

Le thé parut enfin. Le notaire prit, sucra et but sa tasse, après avoir émietté dedans une petite galette trop dure pour être croquée ; puis il se leva, serra les mains et sortit.

— C’est entendu, répétait Roland, demain, chez vous, à deux heures.