Voici les vers :
L’ÉVENTAIL
C’est moi qui soumets le zéphire
À mes battements gracieux
Ô femmes, tantôt je l’attire
Plus vif et plus frais sur vos yeux.
Tantôt je le prends au passage
Et j’en fais le tendre captif
Qui vous caresse le visage
D’un souffle lent, tiède et plaintif.
C’est moi qui porte à votre oreille,
Dans un frisson de vos cheveux,
Le soupir qui la rend vermeille,
Le soupir brûlant des aveux.
C’est moi qui pour vous le provoque
Et vous aide à dissimuler
Ou votre rire qui s’en moque,
Ou vos larmes qu’il fait couler.
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Et cela était signé : Sully Prudhomme. N’est-ce point charmant, de s’éventer avec de la poésie, de la vraie et délicieuse poésie ? Et pourquoi cette mode ne prendrait-elle pas de demander aux poètes de rimer un éventail, comme on demande aux peintres d’en colorier ? Toutes les femmes, dira-t-on, ne pourraient s’offrir un tel luxe. Soit. Cela n’en aurait que plus de prix pour les privilégiées.
MAUFRIGNEUSE.