sur la porte de la sinistre prison la célèbre phrase de Dante :
« Laissez toute espérance, vous qui entrez ! »
On pénètre là, pour la première fois, à vingt ans, pour y rester jusqu’à soixante et plus, et pendant cette longue période rien ne se passe. L’existence tout entière s’écoule dans le petit bureau sombre, toujours le même, tapissé de cartons verts. On y entre jeune, à l’heure des espoirs vigoureux. On en sort vieux, près de mourir. Toute cette moisson de souvenirs que nous faisons dans une vie, les événements imprévus, les amours douces ou tragiques, les voyages aventureux, tous les hasards d’une existence libre, sont inconnus à ces forçats.
Tous les jours, les semaines, les mois, les saisons, les années se ressemblent. À la même heure, on arrive ; à la même heure, on déjeune ; à la même heure on s’en va ; et cela de vingt à soixante ans. Quatre accidents seulement font date : le mariage, la naissance du premier enfant, la mort de son père et de sa mère. Rien autre