Page:Maupassant - Théâtre, OC, Conard, 1910.djvu/203

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— d’ami, — sur un danger possible que pourrait courir votre réputation. Vous êtes belle, très en vue, très enviée. On suppose vite une aventure…

Madame de Sallus.

Pardon. Si nous parlons d’aventure, je demande à faire la balance entre nous.

M. de Sallus.

Voyons, ne plaisantez pas, je vous prie. Je vous parle en ami, en ami sérieux. Quant à tout ce que vous venez de me dire, c’est fortement exagéré.

Madame de Sallus.

Pas du tout. Vous avez affiché, étalé toutes vos liaisons, ce qui équivalait à me donner l’autorisation de vous imiter. Eh bien ! mon cher, je cherche…

M. de Sallus.

Permettez.

Madame de Sallus.

Laissez-moi donc parler. Je suis belle, dites-vous, je suis jeune, et condamnée par vous à vivre, à vieillir, en veuve. Mon cher, regardez-moi. (Elle se lève.) Est-il juste que je me résigne au rôle d’Ariane abandonnée pendant que son mari court de femme en femme, et de fille en fille ? (S’animant.) Une honnête femme ! Je vous entends. — Une honnête femme va-t-elle jusqu’au sacrifice de toute une vie, de toute joie, de toute tendresse, de tout ce pour quoi nous