Page:Maupassant - Yvette, OC, Conard, 1910.djvu/34

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
22
YVETTE.

Elle avait sur les traits un épanouissement de vie, une illumination de bonheur. Sa chair blanche, dorée, une chair de rousse, semblait rayonner. Et l’amas de ses cheveux, tordus sur sa tête, des cheveux cuits au feu, des cheveux flambants, pesait sur son front, chargeait son cou flexible encore un peu mince.

Elle paraissait faite pour se mouvoir comme sa mère était faite pour parler, tant ses gestes étaient naturels, nobles et simples. Il semblait qu’on éprouvait une joie morale et un bienêtre physique à la voir marcher, remuer, pencher la tête, lever le bras.

Elle répétait :

— Ah ! Muscade, bonjour. Muscade.

Servigny lui secoua la main violemment, comme à un homme, et il lui présenta :

— Mam’zelle Yvette, mon ami le baron Saval.

Elle salua l’inconnu, puis le dévisagea :

— Bonjour, monsieur. Êtes-vous tous les jours aussi grand que ça ?

Servigny répondit de ce ton gouailleur qu’il avait avec elle, pour cacher ses méfiances et ses incertitudes :

— Non, mam’zelle. Il a pris ses plus fortes