Page:Maupassant - Yvette.djvu/109

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d’abnégation, de grandeur d’âme, de tendresse et de belles paroles. Sa nature mobile se réjouissait presque de cette attitude nouvelle.

Elle était demeurée jusqu’au soir à méditer sur ce qu’elle allait faire, cherchant comment elle s’y prendrait pour arracher la vérité à la marquise.

Et quand fut venue la nuit, favorable aux situations tragiques, elle avait enfin combiné une ruse simple et subtile pour obtenir ce qu’elle voulait ; c’était de dire brusquement à sa mère que Servigny l’avait demandée en mariage.

À cette nouvelle, Mme  Obardi, surprise, laisserait certainement échapper un mot, un cri qui jetterait une lumière dans l’esprit de sa fille.

Et Yvette avait aussitôt accompli son projet.

Elle s’attendait à une explosion d’étonnement, à une expansion d’amour, à une confidence pleine de gestes et de larmes.

Mais voilà que sa mère, sans paraître stupéfaite ou désolée, n’avait semblé qu’ennuyée ; et, au ton gêné, mécontent et troublé qu’elle avait pris pour lui répondre, la jeune fille, chez qui s’éveillaient subitement toute l’astuce, la finesse et la rouerie féminines, comprenant qu’il ne fallait pas insister, que le mystère était d’autre nature, qu’il lui serait plus pénible à apprendre,