Page:Maupassant Bel-ami.djvu/361

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le neveu du comte de Vaudrec, qui serrait les mains et rendait les saluts.

Quand Georges Du Roy et sa femme furent sortis, ils se mirent à marcher côte à côte, pour rentrer chez eux. Ils se taisaient, préoccupés.

Enfin, Georges prononça, comme parlant à lui-même :

— Vraiment, c’est bien étonnant !

Madeleine demanda :

— Quoi donc, mon ami ?

— Que Vaudrec ne nous ait rien laissé !

Elle rougit brusquement, comme si un voile rose se fût étendu tout à coup sur sa peau blanche, en montant de la gorge au visage, et elle dit : — Pourquoi nous aurait-il laissé quelque chose ? Il n’y avait aucune raison pour ça ?

Puis, après quelques instants de silence, elle reprit : — Il existe peut-être un testament chez un notaire. Nous ne saurions rien encore.

Il réfléchit, puis murmura :

— Oui, c’est probable, car, enfin, c’était notre meilleur ami, à tous les deux. Il dînait deux fois par semaine à la maison, il venait à tout moment. Il était chez lui chez nous, tout à fait chez lui. Il t’aimait comme un père, et il n’avait pas de famille, pas d’enfants, pas de frères ni de sœurs, rien qu’un neveu, un neveu éloigné. Oui, il doit y avoir un testament. Je ne tiendrais pas à grand’chose, un souvenir, pour prouver qu’il a pensé à nous, qu’il nous aimait, qu’il reconnaissait l’affection que nous avions pour lui. Il nous devait bien une marque d’amitié.

Elle dit, d’un air pensif et indifférent :

— C’est possible, en effet, qu’il y ait un testament.

Comme ils rentraient chez eux, le domestique présenta une lettre à Madeleine. Elle l’ouvrit, puis la tendit à son mari.