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les élèves d’ingres

Égypte, autre élément d’une évolution des arts du décor.

À Rome, quand M.  Ingres y arriva en 1800, l’agitation était plus considérable encore. C’est vers 1750 que Winckelmann avait commencé ses études. Le Recueil d’antiquités de Caylus est de 1755 ; le Laocoon de Lessing, de 1763. Jamais l’engouement pour l’antiquité n’avait été si vif, jamais il n’avait alimentéd d’aussi savantes théories. C’est l’époque du beau idéal et des subtilités de Quatremère de Quincy. Faut-il représenter Médée dans le moment qu’elle égorge ses enfants ou quelques instants avant ce crime, alors que l’amour maternel combattait encore avec la jalousie ? faut-il que Laocoon gémisse, ou s’il faut qu’il crie ? s’il est permis à l’art d’étendre son imitation à toute la nature visible dont le beau n’est qu’une petite partie ?… Winckelmann savait qu’au cabinet Cavaceppi un torse d’André del Sarte fournit les meilleures proportions du type du sein virginal… Flaxman, Thorwaldsen. Canova s’efforçaient de restituer en sculpture la beauté antique. Raphaël Mengs imitait le style des peintures récemment découvertes, avec d’autres antiquités importantes, à Herculanum et à Pompéi. Les fouilles commencées en 1748 devaient prendre le plus grand développement sous Joachim Murât de 1812 à 1815. Le premier livre sur ce sujet, qui a précédé les Ruines, de Mazois, est Le Antidata di Ercolano, paru à Naples en 1792. Ces peintures étaient destinées à produire sur les artistes du xixe siècle la même impression que les thermes de Titus sur Raphaël, ou les Noces aldobrandines sur Poussin. Les vases étrusques ou soi-disant tels attiraient l’attention des érudits. Le chevalier Hamilton en avait collectionné et dessiné un grand nombre. Séroux d’Agincourt était aussi à Rome ; il terminait l’Histoire de l’art de Winckelmann ; il avait visité les Catacombes, autre nouveauté, avec Bosio qui les avait le premier parcourues : ce qui vaut d’être noté si l’on songe en quel sens les élèves d’Ingres devaient transformer la peinture religieuse.

Le Génie du Christianisme paraissait d’ailleurs à Paris, en 1802 : à côté du beau canonique, on retrouvait le beau expressif du Moyen-Age ; et pendant que le sculpteur Giraud moulait pour la première fois les Marbres du Vatican ; que Choiseul Gouffier rapportait le fragment des Panathénées au