Page:Maurice Joly - Les Affames - E Dentu Editeur - 1876.djvu/146

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vertu d’un testament révoqué par un testament postérieur que nous produirons quand il le faudra.

— Pouvez-vous me dire quel est le chiffre approximatif de cette succession, quel est le titre de M. Karl pour la recueillir ? Est-ce comme héritier, est-ce comme légataire ? Où la succession s’est-elle ouverte, qui la détient ? Veuillez bien me donner quelques détails.

— Très bien, très bien ! Je vois que nous connaissons notre affaire, dit Doubledent qui avait écouté Georges d’un air approbateur, en faisant le moulinet avec ses pouces ; mais vous ne pensez sans doute pas que je puisse vous livrer un pareil secret sans savoir dans quelles conditions nos rapports peuvent s’établir. Et le ton de cette phrase signifiait : Dans quelles conditions nous pouvons traiter.

— Des conditions ! lesquelles ? M. Karl m’avait parlé de vous comme d’un ancien ami de sa famille, comme d’un parent éloigné qui voulait le faire rentrer dans ses droits par un mobile tout à fait désintéressé. Si votre démarche est dictée par un calcul personnel, ce que je conçois fort bien, veuillez, en effet, m’indiquer vos conditions, et si elles sont raisonnables, modérées, j’userai de mon influence sur M. Elmerich pour les lui faire accepter.

À ce langage, Doubledent, qui n’avait débuté par le sans façon que pour mieux tâter le jeune avocat, comprit tout de suite qu’il fallait le prendre plus au sérieux.

— Vous ne savez pas, lui dit-il, monsieur, en changeant de ton avec une souplesse qui frappa Georges, contre quels adversaires puissants il s’agit d’engager la lutte ? Vous avez du talent, sans doute, mais vous êtes jeune, vous n’avez ni l’autorité ni l’expérience que donnent les grandes affaires et qui recommandent un