Page:Maurice Joly - Les Affames - E Dentu Editeur - 1876.djvu/218

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assis sur la bombe dont le souverain était menacé.

— Mais je ne sais rien de tout cela, je n’ai aucun moyen d’action immédiat dans la main, dites à M. le préfet de police qu’il agisse de suite. Il est officier de police judiciaire, il a tous les pouvoirs que requiert la situation. Je lui délègue, en tant que de besoin, tous ceux que je possède. Voilà où l’Empereur nous mène, avec toutes ses velléités libérales, dit-il en se tournant vers son secrétaire ; allez ! monsieur ; faites ce que j’ai dit et venez me retrouver aussitôt que cela sera nécessaire. Je vais faire prévenir de suite le chef du cabinet de l’Empereur ; justement il est là.

Georges Raymond en gants paille et en cravate blanche, avec un habit coupé à la dernière mode, promenait sa lorgnette dans les différentes parties de la salle pendant que Karl Elmerich, attentif à tous les détails de l’orchestration et du chant, ne perdait pas une note. Revu et corrigé par Georges Raymond comme G. Raymond l’avait été par d’Havrecourt, Karl avait perdu ces airs de négligence et d’abandon que Georges appelait en riant des airs de pianiste crucifié. Ses longs cheveux blonds avaient passé sous les ciseaux, Georges l’avait fait habiller par son tailleur, et sous cette forme nouvelle la rare beauté de Karl n’en était que plus achevée.

En le regardant Georges Raymond se sentait fier d’être le protecteur et l’ami d’un jeune homme aussi bien doué et il se disait que Karl, devenu riche, le protégerait à son tour.

— Voilà Georges décidément lancé, dit le marquis à Marius Simon dans un entracte, et de loin il adressait un salut amical au jeune avocat avec qui il s’était tant bien que mal réconcilié depuis leur que-