Page:Maurice Joly - Les Affames - E Dentu Editeur - 1876.djvu/276

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— Eh bien, monsieur le comte, répondit intrépidement Hector, je ne puis revenir ici parce que j’aime Mlle de Nerval et que je l’aime sans espoir.

— Voilà une déclaration bien prompte, en effet, et à laquelle je ne m’attendais pas, fit le vieux gentilhomme en fronçant le sourcil.

— Je sais, monsieur le comte, que la disproportion des fortunes rend impossible…

— La fortune de Mlle de Nerval est peut-être fort loin de ce que vous pensez, dit le vieux gentilhomme en songeant à la catastrophe dont sa nièce était menacée par la revendication du fils légitime de Daniel Bernard. D’Havrecourt entendit ces paroles avec surprise, Doubledent lui avait laissé ignorer sa démarche auprès de M. de Marcus ; il la devina.

— Achevez, monsieur le comte… fit-il.

— Je dis, reprit M. de Marcus qui ne crut pas devoir s’expliquer, que la fortune n’est pas tout pour moi dans l’homme qui demandera la main de Mlle de Nerval ; mais encore faut-il des conditions d’indépendance…

Le vicomte arrêta M. de Marcus par une expression de surprise supérieurement jouée.

— Je ne pense pas, monsieur le comte, qu’avec douze cent mille francs de fortune on soit précisément dans la pauvreté, dit-il en se rappelant la leçon de Doubledent.

— Vous avez cette fortune ? Je ne le savais pas…

— Et nette de toute charge comme je puis le prouver.

— Soit, monsieur, ne discutons pas ce point en ce moment. Mais vous n’avez pas de position.

— Ah ! monsieur le comte, dans un temps où,