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chez son ami Georges Raymond, et ce qui le confirma dans cette supposition, faite du premier coup, c’est que la police s’était aperçue trop tard de l’évasion d’une seconde personne qui accompagnait le vicomte au chemin de fer.

Quelle pouvait être cette seconde personne, sinon Georges Raymond ?

Tous ces faits liés et combinés dans son esprit, Saporta avait conclu tous ses calculs de probabilité en disant :

— Si la correspondance du comte de B*** est encore chez l’avocat Georges Raymond, il y a quelqu’un qui peut s’en emparer, c’est Isabeau.

On voit à présent tout le fond de cette intrigue si remarquablement conduite. Après avoir enlevé le coffret par une ruse vraiment diabolique, Isabeau avait couru le porter chez le marquis Saporta, qui l’avait immédiatement fait ouvrir, se conduisant en cela comme un aventurier politique sans foi ni loi, tout grand seigneur qu’il était.

La capture dépassait de beaucoup ses espérances ; il put s’en convaincre en lisant les pièces que contenait le coffret. Après avoir fait un présent royal à Isabeau, il s’était rendu sur-le-champ au cabinet de l’Empereur et, donnant donnant, il avait obtenu à peu près ce qu’il demandait pour les chefs de la Révolution espagnole.

L’enlèvement de la correspondance du comte de B*** avait pour le vieux gentilhomme les conséquences les plus graves. Les dangers personnels qu’il pouvait courir étaient le moindre de ses soucis.

Cette correspondance compromettait plusieurs légitimistes qui avaient accepté des situations officielles