Page:Maurice Joly - Les Affames - E Dentu Editeur - 1876.djvu/348

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Georges Raymond, qui crut en effet à une plaisanterie et qui n’apercevait pas le marquis, tendit la main à Soulès, qui était le plus rapproché de lui. Soulès mit sa main dans sa poche. Il s’avança vers Léon Gaupin, qui se mit à regarder le plafond.

— Quel toupet ! s’écria Coq en frappant du poing sur la table. Comment osez-vous vous présenter ici après l’affaire du coffret ?

Les traits du malheureux jeune homme se décomposèrent, mais il conserva une contenance ferme.

— Je crois comprendre ce que vous voulez dire, fit-il d’une voix altérée, mais vaillante, car je vois ici le calomniateur. (Il avait aperçu le marquis qui souriait.) Si quelqu’un veut m’adresser une insulte, qu’il le fasse ou plutôt qu’il ose le faire !

Et, en parlant ainsi, les regards du jeune homme étincelaient, sa contenance était si ferme que personne, pas même le marquis, pas même Coq n’osèrent formuler l’accusation.

— Enfin on s’explique. Répondez, dit Coq qui appréciait le courage.

— Je ne m’explique pas, monsieur, parce que, si je voulais parler, j’accuserais sans preuve, et je parlerai quand il le faudra. Viens, Karl, je t’attends, ajouta-t-il brièvement.

— Ne lui parlez pas, ne bougez pas, dit à l’oreille de Karl l’ex-abbé Ecoiffier qui voyait de l’indécision dans les yeux du jeune homme. Il vous ferait passer pour son complice.

Karl se rappela les choses horribles qu’on lui avait dites ; il songea à Mlle de Nerval et il resta immobile.

— Ah ! toi aussi ? dit Georges avec une amertume