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Les heures aussi continuaient à sonner. Et lorsque, le soir, sonna la dixième heure, il se dit que Catherine et Bertrande n’étaient plus protégées par lui, et que, avec la nuit qui commençait, elles devaient tressaillir de peur.

Il redoubla d’efforts. Ses cordes le serraient avec moins de rigueur, et les points d’attache avaient fini par céder, de sorte qu’il lui était possible d’évoluer plus vite vers l’issue qu’il imaginait. Il respirait mieux, à travers l’étoffe assez lâche de la couverture. Mais la faim, sans toutefois le faire souffrir, rendait sa besogne plus âpre et moins efficace.

Il s’endormit. Sommeil fiévreux, coupé de cauchemars qui le réveillaient en sursaut… et sommeil auquel il s’arracha tout à coup en criant d’angoisse, sans savoir pourquoi.

« Eh ! eh ! dit-il à haute voix, afin de se remettre en équilibre, est-ce que mon cerveau va chavirer pour deux malheureux jours de fatigue et de diète ? »

Sept heures sonnaient. C’était le matin du 12 septembre, le premier des jours fatidiques annoncés par lui. Tout laissait prévoir maintenant que l’ennemi gagnerait la bataille.

Cette idée le fouetta d’une énergie où il y avait de la rage et de l’exaspération. La bataille gagnée par l’autre, c’était la défaite et la ruine des sœurs, le grand secret dérobé, l’impunité du coupable… et c’était sa mort à lui. S’il voulait ne pas mourir et vaincre, il fallait soulever la pierre du tombeau, et s’échapper.

Il avait conscience, à l’air plus vif qu’il respirait, que l’issue n’était pas loin. Une fois dehors, il appellerait, on viendrait, il serait sauvé.

Il donna l’effort suprême. Peut-être allait-il passer, lorsque soudain il eut l’impression qu’il se produisait autour de lui comme un cataclysme.