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Page:Maurice Leblanc - La Barre-y-va.djvu/182

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« Au galop… déménage. »

L’autre essaya de se rebiffer. Alors Raoul lui saisit à pleine main la manche de son veston à l’endroit de l’épaule, le poussa vers sa chaise, qui bascula, le fit pirouetter, et, sans se soucier des gens qui observaient la scène, l’entraîna vers le couloir, puis vers le vestibule, puis vers la rue. Et il mâchonnait :

« Dégoûtant personnage… tu n’as pas honte ? Voilà que tu t’exhibes avec un assassin et une cuisinière… toi, un brigadier ! une légume de la police ! Et tu crois que Lupin va tolérer ça ? Attends un peu, fripouille ! »

Parmi les passants ahuris, il le portait presque à bout de bras, comme un mannequin disloqué, et il continuait ses invectives, ravi au fond de cette diversion à ses chagrins.

« Oui… chenapan… misérable ! Tu n’as donc pas plus de sens moral qu’une citrouille ? Voilà où le plus abominable amour te fait dégringoler ? Voilà tes compagnons de débauche… un assassin et une cuisinière ! Ah ! heureusement que Lupin est là pour te sauver… et pour te sauver malgré toi. Ah ! Lupin, voilà, voilà un bonhomme ! Est-ce qu’il obéit à sa passion, Lupin ? Lui aussi il peut avoir des peines de cœur. Celle qu’il aime est riche maintenant, grâce à lui, et elle retrouvera son fiancé. Est-ce qu’il se plaint ? Bertrande, qu’il aime aussi, l’oubliera. Est-ce qu’il pense seulement à courir après elle ? Non. Leur bonheur avant tout. Le bonheur de Bertrande ! La pureté de Catherine ! Et pendant ce temps-là, tu te cramponnes à une cuisinière ! »

Raoul avait ainsi mené Béchoux dans le quartier de l’Europe où se trouvait son garage. Il le conduisit devant sa voiture et lui dit :

« Monte.

— Tu es fou.