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Page:Maurice Maeterlinck - L'intelligence des fleurs, 1922.djvu/261

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L’ACCIDENT

cheval prit peur, s’emballa et s’alla jeter dans le gouffre. Les voyageurs se sentirent rouler dans la mort, et la femme, d’un admirable geste d’amour maternel, voulant sauver l’enfant, le lança, au suprême moment, de l’autre côté de la carriole, où il tomba sur la route, tandis que tous les autres disparaissaient dans le précipice hérissé de rocs meurtriers. Or, par un miracle assez habituel quand il s’agit de vies humaines, les sept victimes, retenues à des broussailles, à de vagues branchages, n’eurent que d’insignifiantes égratignures, au lieu que le pauvre petit mourait sur le coup, le crâne défoncé par une pierre du chemin. Deux instincts contraires avaient ici lutté, et celui où s’était probablement mêlé une lueur de réflexion, avait fait le geste le plus maladroit. On parlera de chance, de guignon. Il n’est pas défendu d’évoquer ces mots mystérieux, pourvu qu’il demeure entendu qu’ils s’appliquent aux mystérieux mouvements de l’inconscient. Il est en effet