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chasses et voyages au congo

dent un souvenir reconnaissant — au dessert donc, ma femme, en vraie Belgo-Luxembourgeoise, qui a retrouvé un compatriote, après avoir parlé de Bruxelles, demanda :

— Et connaissez-vous Luxembourg ?

— Comment donc, j’y ai passé dix-huit mois pendant la guerre.

— Pas possible, nous vous aurions connu ; mon mari était député et s’occupait particulièrement des réfugiés belges.

— Aussi n’y allais-je pas officiellement.

Et M. B. de nous raconter avec modestie son odyssée, d’ailleurs connue de moi dans les grands traits. Mais j’ignorais le nom du héros, qui à l’armistice s’était éclipsé, fuyant les ovations. Chargé par l’état-major anglais d’une mission secrète, le lieutenant B. de l’armée belge, avait quitté Verdun, seul, en ballon. Descendu de nuit à Grosbous, près de Rédange, l’officier sauta à terre et libéra son ballon pour effacer toute trace de sa venue. Allégé celui-ci d’une envolée le sépara des siens, peut-être à tout jamais, et l’aventure commença. Jusqu’à Luxembourg, le voyage se fit en chemin de fer, par notre Prince-Henri, en compagnie de deux officiers allemands, qui fumaient et causaient — l’un d’eux Tesmar peut-être ? Puis notre héros, tour à tour, jardinier, manœuvre, ou traqueur à nos battues, accomplit sa mission. Un médecin luxembourgeois, de mes amis, avisé de son projet, l’avait recueilli, et me demanda un jour des habits pour un officier français, évadé des prisons d’outre-Rhin, les siens étant trop grands pour lui. À cette époque déjà les vêtements se faisaient rares à Luxembourg, les magasins n’en vendaient plus. Je lui envoyais des complets de mon beau-frère français, plus petit que moi, qu’en 1914 il avait laissés à la maison en partant pour reprendre la tunique bleu-clair des chasseurs.

N’est-ce pas une coïncidence invraisemblable, d’être invité, au-delà de l’Équateur, chez une personne dont on a connu les exploits à deux pas de chez soi, sans la con-