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ANTHINEA

de soldats prussiens. Les industries, les arts plastiques, la poésie et l’éloquence doivent, à les entendre, s’avancer simultanément et sur un même parallèle, faute de quoi l’on nie tout avancement partiel. La plus légère application aux réalités de l’histoire fera sentir la grande vanité du système. Il n’y a que ces progressistes et les sots pour croire au développement synchronique de l’art. Comparez le pinceau brillant, mais toujours contraint, du vieux Giotto, aux libres paroles de Dante, dont il est le contemporain : vous sentirez peut-être comment Homère a pu paraître parmi des ouvriers ignorants, des céramistes grossiers et des statuaires trop simplificateurs.

Ce doux Homère incorporé de force à la barbarie mycénienne ne fournissait pas le dernier de mes griefs contre les salles de Schliemann. Le soir même de mon arrivée en Attique, le grand théâtre d’Athènes avait annoncé une représentation d’Antigone jouée par des étudiants et des institutrices sous la conduite du savant professeur Mitriotis. C’est là qu’eut lieu mon premier différend avec Mycènes. Dès le rideau, la sensation en fut violente : cette scène où l’original de Sophocle allait retentir montrait au fond de son décor, devant le portique royal, toute une colonnade de l’ordre détesté… Au lieu de ce style dorique, noble, fort, dont la base, conformément à la na-