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Page:Maurras - Kiel et Tanger - 1914.djvu/307

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le retour à l’inertie

reconnu pour un stigmate naturel et nécessaire du régime, et destiné à durer autant que lui-même. Il se produisit donc une poussée de sens commun dans les régions gouvernementales, où chacun s’aperçut que la sagesse était de ne plus bouger désormais. Toute une presse invoqua à cor et à cri les maximes de la plus épaisse prudence.

M. Harduin, qui avait joué dans cette histoire le rôle à demi bouffe du chœur des tragédies antiques, n’a pas mal traduit ce que « pensent » les vieux républicains, M. Ranc, M. Mascuraud, sur ce qu’il appelle « l’absurde cauchemar marocain ». « Et je pense, à ce propos, que nous étions bien tranquilles, que nous aurions parfaitement pu continuer à l’être, si un ministre n’avait pas éprouvé le besoin, alors que personne ne le lui demandait, de faire de la haute politique. À quoi tient, cependant, le sort des nations ! Deux peuples vivent en paix, et, un beau jour, les voilà sur le point de s’égorger parce qu’un petit monsieur s’amuse à sortir du néant une question qui, sans aucun inconvénient, pouvait y rester. Ah ! être délivré des gens qui font du zèle, quel rêve[1] ! » Le portefeuille de M. Delcassé fut remis à M. Rouvier. L’imagination politique ou littéraire cédait à la vieille pratique.

M. Rouvier était considéré pour son expérience. On tenait compte de ses rares talents de financier, l’affaire du Maroc étant aux trois quarts finan-

  1. H. Harduin : Matin du 14 janvier 1906.