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Page:Maurras - Kiel et Tanger - 1914.djvu/92

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préface de la deuxième édition

qu’une cause extérieure cessera de l’impressionner.

Comme deux de ces causes agissaient puissamment (les menaces européennes, notre action sur l’esprit public) il était difficile aux républicains de gauche de traiter d’idolâtres et d’adorateurs de Moloch les demi-radicaux qui pressaient le pays d’adopter pour commune mesure le critère de son intérêt national. L’esprit républicain se consolait en prévoyant que les partis ont toujours été subtils et habiles à se déchirer sur la manière de comprendre le bien public. Tout débat un peu prolongé sur le meilleur moyen de servir la patrie peut finir par causer tout autant de désordres que l’antipatriotisme, l’antimilitarisme et l’anarchisme réunis.

On peut d’ailleurs adopter ce critère en le détestant. C’est le parti que prirent notamment Jaurès et Sangnier — le Jaurès de l’Affaire, le Sangnier de Par la Mort ![1]… Ces ennemis publics prétendirent servir, et bien mieux que les autres, et même servir seuls l’intérêt sacré. Ce privilège revendiqué hardiment leur assura le libre usage de toutes les ressources du vocabulaire patriotique et les introduisit dans le débat à la manière de ces belligérants sans drapeau ni uniforme qui déterminent les plus sinistres méprises. Grâce à

  1. Dans ce drame, M. Marc Sangnier bafoue l’idée de la revanche et tourne en ridicule le patriotisme guerrier. Voyez, à l’appendice de mon Dilemme de Marc Sangnier une analyse de Par la mort, rédigée par M. François Veuillot.