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l’avenir de l’intelligence

Il faudrait rassembler de puissants organes matériels de publicité, pour se faire entendre, écouter, malgré les volontés et les intérêts d’un État résolu à ne rien laisser grandir contre lui ; mais cet État, s’il a un centre, est dépourvu de tête. Son incohérence et son étourderie éclatent à chaque instant : c’est lui qui, par sa politique scolaire, a conservé à l’Intelligence un reste de prestige dans le peuple ; par ses actes de foi dans la raison et dans la science, il nous a coupé quelques-unes des verges dont nous le fouettons.

Les difficultés de cette entreprise, fussent-elles plus fortes encore, seraient encore moindres que la difficulté de faire subsister notre dignité, notre honneur, sous le règne de la ploutocratie qui s’annonce. Cela, ce n’est pas le difficile ; c’est l’impossible. Ainsi exposée à périr sous un nombre victorieux, la qualité intellectuelle ne risque absolument rien à tenter l’effort ; si elle s’aime, si elle aime nos derniers reliquats d’influence et de liberté, si elle a des vues d’avenir et quelque ambition pour la France, il lui appartient de mener la réaction du désespoir. Devant cet horizon sinistre, l’Intelligence nationale doit se lier à ceux qui essayent de faire quelque chose de beau avant de sombrer. Au nom de la raison et de la nature, conformément aux vieilles lois de l’univers, pour le salut de l’ordre, pour la durée et les progrès d’une civilisation menacée, toutes les espérances flottent sur le navire d’une Contre-Révolution.