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le romantisme féminin

l’odeur et la couleur des vagues » et vu flotter, « ondoyantes et vagues », « les brumes du Nord » ! Toute cette Scandinavie peut encore se défendre ; mais pourquoi appeler l’infortuné pêcheur

                         … fils errant des étoiles
         Et fils du Destin ?

Ce Pélagon ressemble comme un frère au voyageur du dernier poème des Fleurs du Mal. Je connais bien au Louvre une figurine de Tanagra dont les vêtements et la pose ne rappellent point mal le vicomte de Chateaubriand et pourraient servir à illustrer ses Martyrs ; mais il subsiste des différences entre les deux arts. Un dernier exemple les fera saisir.

On a conservé ce distique mélancolique et charmant : « Ô soir, tu ramènes tout ce que le lumineux matin a dispersé, tu ramènes la brebis, tu ramènes la chèvre, tu ramènes l’enfant à sa mère… » Le morceau est arrêté là, et tout indique dans l’intention du poète un retour sur lui-même, triste plus que joyeux. Mais quelle pouvait être la tonalité de cette tristesse ? Métaphysique ! répond, d’instinct, Renée Vivien : métaphysique et surnaturelle ! À peine a-t-elle écrit que le repos, l’oubli divin redescendent avec le soir sur les corps fatigués, son imagination retourne aux Enfers : aucun jour ne finit ni ne recommence, dit-elle, pour les âmes des morts, prisonnières d’un crépuscule invariable. Ce voyage aux Enfers se double même et se surcharge d’un symbole psychologique. Le poète nous insinue que notre âme est dans un enfer,