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l’avenir de l’intelligence

ganique de la société, l’instabilité des Gouvernements ne permettaient, de ce côté, que des mouvements de passion. Ni politique orientée, ni tradition suivie. Confrontée avec les parvenus de l’Intelligence, la vieille France s’efforçait de faire sentir et de maintenir son prix : tout en les accueillant parfois, elle fut loin de les subir, comme elle avait subi le monde de l’Encyclopédie. Ces sauvages ne demandaient qu’à s’apprivoiser ; ils étaient donc moins intéressants à connaître. Ils la cherchaient : elle avait donc intérêt à se dérober ; elle le fit, plus d’une fois à son dommage.

Cependant, une grande bonhomie, bien conforme au caractère de la race, présida longtemps encore aux relations, quand il s’en établit, entre les deux sphères. Rien n’était plus aisé, au sens complet d’un mot charmant, que l’accès de certaines demeures anciennes et de leurs habitants fidèles aux mœurs d’autrefois. La plus exquise des réciprocités, celle du respect, faisait le fond de la politesse en usage. Une vie parfaitement simple annulait, en pratique, la plus voyante des inégalités, qui est celle des biens. À l’idolâtrie, dont la fin de l’ancien régime avait honoré le moindre mérite intellectuel, succédait un procédé beaucoup plus humain, qui avait l’avantage de convenir aux esprits délicats, qu’eût choqué l’excès de jadis. Un homme de haute intelligence, mais sans naissance et sans fortune, fut longtemps assuré de trouver dans les classes supérieures de la nation cet accueil de plain-pied, dont tout Français, né patricien, même s’il vient du petit peuple, éprouve au plus haut point la