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Page:Maxence Van der Meersch La Maison dans la dune 1932.djvu/148

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la maison dans la dune

rait dû logiquement se passer son existence, si les choses avaient été comme elles devaient être. Il y était chez lui. Il aimait tout de ce morceau de verdure perdu dans la lande, les arbres, le jardin, le canal, la maison. Quand il arrivait là, il lui semblait remonter en arrière, dans le cours des années. Il n’était plus Sylvain le fraudeur. Il ne pensait même plus à son métier, à tout ce qu’il laissait derrière lui, là-bas, et qu’il retrouverait le soir. Il se sentait redevenu le Sylvain de ses quinze ans, le Sylvain courageux et honnête encore, qui espérait naïvement trouver le bonheur dans une vie de labeur paisible. Ici, les choses lui paraissaient plus simples, comme dépouillées de cette complication que son dangereux métier lui faisait trouver partout. C’était un des rares endroits où il se sentît en sécurité, où il ne craignît pas de sentir sur son épaule, brusquement, la poigne brutale de la police. On ne parlait pas de tabac, ni de douane, dans la vieille auberge. Ces choses-là n’existaient plus. Il n’y avait plus qu’un Sylvain joyeux et toujours content, qui retrouvait avec un bonheur indicible le genre de vie pour lequel, sans le savoir, il avait été fait.

— Vous coupez comme un vrai coiffeur ! s’exclama la vieille femme.