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Page:Maxine - Moment de vertige, 1931.djvu/124

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MOMENT DE VERTIGE

petite fille, dit-il ; vous étiez assise à l’arrière du paquebot et vous regardiez le sillage blanc qu’il creusait dans le fleuve !

— Oui, monsieur Dean, en effet, j’y voyais les beaux jours de mon voyage qui allaient, eux aussi, s’enfuir !

— Non, chère enfant, ce ne sont pas ces beaux jours que vous avez vus là. Savez-vous ce que vous voyiez ?… les compagnons du bord, ces intimes de huit jours, ces gais amis de salle à manger, ces danseurs du soir, ces partenaires de bridge, ces voisins de cabine… tous ces amis de la traversée, que l’on aime bien, et que l’on croit ne pas oublier… puis la vie normale nous reprend avec ses plaisirs, ses intérêts, son agitation… et le souvenir de ces amis passagers s’estompe… s’estompe… et disparaît… comme le sillage blanc du navire !… C’est cela que vous avez vu, ma petite amie… « ships that pass in the night »…

— Il me semble, répondit Marthe, que votre souvenir, cher monsieur Dean, s’estompera bien lentement et ne pourra pas s’effacer tout-à-fait. J’ai d’ailleurs dans mon kodak une petite photo qui m’empêchera de vous oublier !

— Adieu, bonne petite camarade ! dit le vieux monsieur en lui serrant la main, je souhaite que la vie vous soit bonne et que vous ayiez un mari digne de vous !

— Merci, cher monsieur, adieu !