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sur les bords du nil


donnent une lueur suffisante pour faire distinguer le contour des objets. Je n’avais pas été longtemps à sortir de l’eau, et mon premier soin maintenant était de m’assurer de l’état des lieux du côté du harem. Je vis distinctement en face de, moi la grille dont j’avais, la veille, enlevé la serrure, et j’y remarquai une ouverture qui n’existait point les jours précédents. Elle était d’ailleurs trop étroite pour que je songeasse à en profiter.

C’était là certainement que Sénitza habitait. La jeune fille avait-elle compris qu’il fallait m’attendre ? Lorsque je sortais du bassin, un léger craquement s’était fait entendre sans que rien dans la cour ait pu me l’expliquer ; ce craquement avait-il été causé par l’ouverture de la grille, et, en ce cas, la prisonnière m’avait-elle aperçu ? Me reconnaissait-elle ?

Je m’approchai, mettant mes deux mains autour de mes lèvres ; je sifflai plutôt que je murmurai :

« Sénitza ! »

L’ouverture s’agrandit dans le grillage, une petite tête brune apparut, et une voix bien basse me répondit :

« Qui es-tu ?

— Le médecin.

— Tu viens pour me sauver ?

— Oui ; tu as compris mes paroles ?

— Oui. Es-tu seul ?

— Isla m’attend dehors.

— Oh ! ils le tueront !

— Qui donc le tuerait ?

— Qui ? Abrahim ! Il veille toute la nuit ; la femme qui me garde ne quitte pas ma chambre. Tiens, écoute… Oh ! fuis…, fuis bien vite ! »

En ce moment j’entendis du bruit derrière la porte du selamlik. Le grillage du harem se referma. Je me hâtai de me rapprocher du bassin, le seul endroit où je pusse me cacher ; je m’y glissai bien doucement, afin que le mouvement de l’eau ne me trahit point.

À peine avais-je regagné mon humide cachette, qu’Abrahim apparut ; il fit à pas lents le tour de la cour. Je me tenais dans l’eau jusqu’à la bouche ; ma tête se trouvait dissimulée par le rebord du bassin. L’Égyptien ne m’aperçut point. S’étant assuré que la porte était fermée, il continua encore sa ronde pendant