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Page:May - Les Pirates de la Mer Rouge, 1891.djvu/110

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sur les bords du nil

« Fuyez ! m’écriai-je, fuyez vers le bateau. »

Ils se hâtèrent, et il était grand temps ; j’entendais Abrahim s’agiter derrière la porte. Pour couvrir la retraite des jeunes gens, je ne m’empressai pas trop de les suivre. L’Égyptien, accouru sur le seuil, me vit fuyant ; il aperçut aussi l’échelle renversée et se mit à donner l’alarme, criant comme un damné :

« Voleur ! brigand ! arrêtez-le !… Eh ! les gens ! accourez donc, lâches que vous êtes ! »

Tout en hurlant ainsi, Mamour me poursuivait aussi vite que lui permettait son poids.

En Orient le dormeur est bientôt prêt, car il couche tout habillé sur son divan. Les hommes de la maison se trouvèrent à l’instant sur pied.

L’Egyptien allait m’atteindre. A dix pas de moi, la porte d’entrée restait ouverte, mais de la porte intérieure deux esclaves venaient de s’élancer sur ma trace. Je remarquai qu’Isla, soutenant sa fiancée, s’enfuyait vers la droite ; je fis un détour à gauche pour dérouter Abrahim, qui du reste ne voyait que moi.

Arrivé sur le seuil, je sautai dehors et pris la direction opposée à celle où nous attendait notre chaloupe, tout en me rapprochant de la rive.

« Scélérat ! traître ! arrête, ou je tire ! » criait Abrahim de plus en plus furieux.

Il était armé, à ce qu’il paraissait ; cependant je courais toujours. Si la balle m’avait atteint, j’étais mort ou je devenais son prisonnier, car ses gens le suivaient de près ; je l’entendais à leurs exclamations.

Il courait trop fort pour bien viser, sa balle me manqua. Je feignis d’être frappé, je me jetai à terre. Mamour, qui à ce moment venait d’apercevoir Isla et la jeune fille, ne s’arrêta point près de moi ; il continua à courir du côté de la barque ? où les fugitifs montaient avec l’aide de Halef.

Je me relevai brusquement, me précipitai sur Abrahim par derrière et le renversai ; mais les cris des fellahs qui s’approchaient ne me permirent pas de lui faire grand mal ; je le laissai se débattre, reprenant ma course folle ; j’atteignis enfin le canot, où je tombai hors d’haleine. Avant que maître et esclaves fussent prêts à nous poursuivre, nos fidèles rameurs poussaient déjà vers le large.