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Page:May - Les Pirates de la Mer Rouge, 1891.djvu/195

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les pirates de la mer rouge

Quelques minutes plus tard, nous montions sur nos chameaux ; le cheikh, sa fille et cinq hommes voulurent nous faire escorte. Je remarquai qu’ils nous reconduisaient par une route différente et plus rapprochée de la mer. Albani, cette fois, commençait à se tenir convenablement en selle ; son chameau emboîta le pas des nôtres.

Le cheikh, qui se tenait près de moi, me dit au moment où nous gravissions une petite montée, en me montrant du doigt l’horizon :

« Ils sont là-bas, Effendi ?

— Qui donc ?

— Les pirates ! J’ai deviné, n’est-ce pas ?

— Peut-être, mais ne m’interroge point sur le lieu de leur retraite. »

Il se tut, sachant bien qu’il ne se trompait pas. Nous marchâmes en silence. Au bout de quelques instants, deux petites lignes noires se détachèrent du fond de l’horizon ; elles paraissaient s’avancer de la ville vers le golfe où mouillait le vaisseau forban. Avec ma longue-vue je distinguai deux piétons, chose rare au désert. Je présumai que ces hommes devaient faire partie de la troupe d’Abou Seïf. Ils venaient sans doute de la ville à l’occasion de mon évasion.

Malek aussi reconnut peu après les voyageurs ; il les regarda longtemps, puis conféra bas avec ses hommes. Trois cavaliers quittèrent notre escorte pour rebrousser chemin. Je compris l’intention, on voulait barrer la route aux messagers ; mais pour les surprendre il était nécessaire de faire un long détour, et de ne revenir en face d’eux que quand ils auraient perdu de vue les cavaliers, tandis que le vieux chef et ses gens se tiendraient prêts à les envelopper d’un autre côté.

Le cheikh avait eu la même idée que moi au sujet de ces hommes.

« Effendi, me demanda-t-il, veux-tu continuer ton chemin ou rester avec nous ?

— Tu as l’intention d’interroger ces piétons, n’est-ce pas ? En ce cas je reste.

— Ce sont des Djeheïne.

— Je le crois aussi ; tes hommes vont leur couper le retour du côté du golfe : Halef et moi nous les empêcherons de rentrer dans la ville ; toi, prends-les en flanc.

Les Pirates de la mer Rouge.
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