de mouton fortement épicées ; puis les kabah, petits morceaux de rôtis présentés sur des brochettes de bois ; puis le kima, viande cuite et entourée de grenades, de pommes, de coings ; enfin le raha, plat sucré accompagné d’une quantité de friandises du même genre.
Était-ce tout ? Non pas ! Au moment où je croyais le festin terminé, apparut justement la pièce principale : un mouton tout entier rôti à la broche !
Je n’en pouvais plus.
« El hamdouillah ! » m’écriai-je en plongeant mes mains dans le vase rempli d’eau et en les essuyant convenablement à mes vêtements.
C’était dire que j’en avais assez ; l’Oriental ne connaît pas les instances fatigantes de notre politesse ; ces mots prononcés, tout est fini ; mon Anglais le remarqua, non sans quelque satisfaction.
« El hamdillah ! » balbutia-t-il à son tour avec empressement, puis il lava ses mains dans le vase commun. Mais où les essuyer ? Le vieux cheikh vit l’embarras de l’homme aux carreaux gris ; il tendit son haïk en me disant :
« Que ton ami essuie ses mains à mon vêtement. Les Anglais ne connaissent guère la propreté, car ils portent des habits qui ne peuvent leur servir quand ils ont les mains sales. »
Je transmis à Lindsay l’offre gracieuse du cheikh ; il s’exécuta sans broncher.
Pour achever le festin, on nous donna encore du café, et nous dûmes goûter l’araki ; enfin on apporta des pipes ; alors le cheikh commença à me présenter aux autorités rassemblées.
« Hommes de la tribu des Haddedîn el Chammar, dit-il, cet homme que vous voyez est un grand émir et un hadji du pays des Oulad Djerman ; son nom est…
— Hadji Kara ben Nemsi, me hâtai-je d’ajouter.
— Oui, son nom est Hadji Kara ben Nemsi. C’est le plus grand guerrier de son pays et le plus savant taleb parmi son peuple. Il possède de l’eau du Zem-Zem et va par toute la terre pour chercher des aventures. Savez-vous comment on peut l’appeler ? On peut l’appeler un djehad[1]. Il faut essayer de l’engager à combattre avec nous contre nos ennemis. »
- ↑ Djehad, sorte de chevalier errant du mahométisme, combattant pour sa foi.