Aller au contenu

Page:May - Les Pirates de la Mer Rouge, 1891.djvu/284

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
282
une bataille au désert

— Non.

— Et si nous te rendions ton cheval et tes armes ?

— Non.

— Où as-tu été depuis hier ?

— Partout, aux environs.

— Bien ! tu ne veux pas répondre, tu t’en repentiras. Emmenez-le. »

Je fus conduit dans une petite tente très basse ; on me fit étroitement garder par deux Bédouins. Rien n’avait été décidé sur mon sort, le conseil me paraissait indécis. Épuisé de fatigue, encore un peu étourdi du coup que j’avais reçu, je m’endormis assez profondément malgré le péril de la situation. Des rêves étranges agitaient cependant mon cerveau : je me croyais dans une oasis du Sahara, montant la garde autour du campement, buvant du jus de palme, écoutant les légendes de mes compagnons arabes. Puis tout à coup retentissait cette voix, que nul ne peut oublier quand une fois il l’a entendue, la voix du lion, le rugissement de l’Assad-bey, de l’étrangleur des troupeaux. Et cette voix, se rapprochant toujours, devenait de plus en plus formidable.

Je m’éveillai. Était-ce bien un songe ? À mes côtés, les deux Bédouins récitaient la sainte fatha, la prière du danger suprême, et le tonnerre que j’avais cru entendre retentissait pour la troisième fois à mes oreilles.

Un lion rôdait autour du camp.

« Vous ne dormez pas ? demàndai-je à mes gardiens.

— Non.

— Entendez-vous le lion ?

— Oui. Voilà quatre jours qu’il vient ici chercher une proie.

— Vous ne le tuez point ?

— Qui oserait le tuer, lui le puissant, le redoutable Seigneur de la mort !

— Poltrons ! Est-ce qu’il pénètre dans l’intérieur du camp ?

— Non, mais les hommes n’osent sortir des tentes ; ils sont rassemblés pour écouter sa voix.

— Le cheikh veille-t-il parmi eux ?

— Oui.

— Que l’un de vous aille vers lui, qu’il lui dise : Le prisonnier s’engage à tuer le lion si on lui rend ses armes.