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Page:May - Les Pirates de la Mer Rouge, 1891.djvu/329

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une bataille au désert

— Si nous les interrogions ?

— Excusez-moi, sir, on va tenir le conseil ; je serais curieux d’y assister.

— Du moins vous m’aiderez ensuite.

— Certainement. »

Je me rendis d’abord à l’endroit où se faisaient les pansements. Le cheikh tenait sa parole : on suivait ponctuellement mes prescriptions ; je ne pouvais que louer et me hâtai de rejoindre Malek, qui m’accueillit en me disant :

« Émir hadji Kara ben Nemsi, tu vas nous donner un bon conseil ; tu as visité toutes les contrées du monde, tu en connais les lois et les usages ; à qui juges-tu que doivent appartenir les armes des vaincus ?

— Aux vainqueurs.

— Et leurs chevaux ?

— De même.

— Et leurs habits ?

— Des pillards seuls prendraient les habits ; de vrais guerriers se contentent des armes et des montures.

— À qui l’argent et les bijoux ?

— Je te l’ai dit, des hommes d’honneur ne pillent point ; contentez-vous des armes et des chevaux.

— À qui appartiennent les troupeaux du vaincu ?

— S’il n’a d’autre ressource que ses bêtes, elle doivent lui être laissées, mais en le soumettant à un tribut qui payera les frais de la guerre et servira à l’affaiblir.

— Tu parles comme si tu étais l’ami de nos ennemis ! Nous les avons vaincus : leurs vies, leurs biens, tout est à nous.

— Je parle comme un ami de la justice et de l’humanité. Tu prétends que la vie des prisonniers vous appartient ?

— Oui, certes.

— Voulez-vous donc les égorger tous ?

— Non ; nous ne sommes pas des bourreaux.

— Et cependant vous voulez leur enlever leurs troupeaux ; pourront-ils vivre sans bétail ?

— Non.

— Donc, si vous leur prenez leurs troupeaux, vous leur prenez la vie ! De plus, vous vous nuisez à vous-mêmes.

— Comment cela ?