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À STAMBOUL

accueillie avec de vives démonstrations de douleur, et l’on résolut de célébrer une grande cérémonie funèbre en sa mémoire.

Ce deuil public n’empêchait point Hanneh, la jeune femme de mon Halef, de se livrer aux transports de la joie la plus folle à la vue de son mari. Celui-ci n’était pas moins ravi. Son bonheur redoubla lorsque la jeune Arabe, le conduisant à sa tente, lui montra un petit hadji arrivé depuis peu en ce monde pour y entreprendre son pèlerinage. Je fus admis à contempler cette scène de famille.

« Sais-tu, sidi, me demanda Hanneh, quel nom j’ai donné au petit garçon ?

— Non, madame Halef.

— Eh bien, il s’appelle Kara ben Halef, comme toi et son père.

— Ô la couronne, la fleur des femmes ! s’écria mon petit compagnon, tu as bien choisi ! Mon fils sera un héros, comme son père… Son nom doit être plus long que l’épée de l’ennemi… Tous les hommes de la terre l’honoreront ; toutes les jeunes filles seront éprises d’amour à sa rencontre ; tous ses ennemis fuiront devant son seul regard. Ils n’oseront résister dès qu’on prononcera dans le combat le nom de Kara ben Halef Omar ben hadji Aboul Abbas, ibn hadji Daoud al Gossarah ! »

Le cheikh Malek témoigna aussi une grande joie de notre retour. Il avait pris une influence marquée sur les Haddedin en l’absence de leurs chefs. Je ne doutais pas que son âge, son expérience, ne le missent au rang des candidats à la dignité de cheikh des deux tribus, maintenant que la mort de Mohammed et la disparition d’Amad el Ghandour allaient nécessiter une élection. Dans le cas où les Chammar placeraient le vieux Malek à leur tête,