Page:Mendès - La Légende du Parnasse contemporain, 1884.djvu/280

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ne laissons debout aucune fausse grandeur. La clarté dans toutes les ombres, la vérité dans toutes les illusions. Il le faut. Aucune pitié pour aucun rêve. Deux et deux font quatre. Et puisse le Fait nous consoler de l’ldéal perdu.

Je parle presque sans ironie, avec tristesse seulement. Le vrai est le but de ce siècle, et sera le prix de ses efforts. Pour nous élever jusqu’à nos destinées définitives, il faut jeter le lest ancien. Nous l’avons jeté presque tout entier, et nous arriverons sans doute. Qu’adviendra-t-il cependant des poètes, des peintres, des musiciens, des sculpteurs, des artistes en un mot ? Quelle place pourront-ils occuper dans une société qui n’aura plus souci que de la réalité ? Pour être tolérés devront-ils cesser d’être ce qu’ils sont en effet ; c’est-à-dire les dévots de tous les dieux, les admirateurs de toutes les gloires, les enthousiastes de toutes les beautés ? Ils ne le pourraient pas. C’est en vain que quelques-uns, par un consentement qui ne serait qu’une apparence, voudraient se restreindre à célébrer les éloges de la vie actuelle. La vision même de l’avenir ne suffirait pas à emplir leurs yeux et leurs cœurs. Ces hommes étranges