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FRÉDÉRICK

anges descendus enveloppaient le roi du paradis ensoleillé de leurs ailes.

Mais, ainsi qu’un aigle, après avoir touché la terre, se renvole, l’éclatante musique, avec un éloignement de splendeurs, s’atténua, s’affaiblit, et, peu à peu, dans la fuite lente d’un vol de moins en moins sonore, ne fut plus, très loin, très haut, parmi les vibrations d’une ineffable clarté, qu’une frêle mélodie, indécise, presque inentendue, et délicieuse, hélas !

Alors Frédérick, après un instant de rêverie attristée, entra dans la nacelle et dit au cygne : « Va ! » comme si, dans un voyage sur le beau lac pareil à un ciel étoilé il eût espéré rejoindre les anges envolés qui l’appelaient, si faiblement, du haut du paradis.

Mais bien que le cygne ramât des pattes, en offrant ses ailes au souffle, la barque dorée ne s’éloigna pas : une petite main la retenait au bord.

— Lisi ! s’écria le roi, pâlissant.

Une jeune fille était là, en effet. Toute rose, un peu grasse, sous ses courts cheveux blonds qui lui mettaient au front de jolies boucles folles, elle se tenait à genoux sur la rive, et tirait