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LE ROI VIERGE

De la cour d’honneur du château, elle avait fait une basse-cour ; des pigeons nichaient dans les antiques murailles escaladées de lierre ; des poules becquetaient les mousses entre les dalles défoncées, où d’imprudents lézards venaient se chauffer au soleil ; il y avait, dans une mare grasse, des escadrilles de canards barbotant ; des dindons de moire noire pesamment se prélassaient en laissant pendre la molle peau rouge de leur jabot, pendant que, les ailes battantes, à la pointe d’an éboulement pierreux, un coq de pourpre et d’or hérissait dans le soleil sa crête, avec un rauque cocorico ; et c’était un assourdissement de bruits qui piaillent, cliquettent, crient, gloussent, roucoulent, un enveloppement de plumes ébouriffées qui se pressent et palpitent et veulent voler, lorsque Lisi, sa jupe courte entre les genoux, ses manches retroussées, — tout l’air d’une petite fermière — éparpillait hors d’un panier plat l’avoine et le maïs que se disputaient à terre des querelles de pigeons, ou que le coq happait en l’air dans un vif sursaut d’ailes ! Une fois, l’une des poules, un très joli oiseau exotique, blanc, avec une huppe de plumes dorées, eut l’air de devenir