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FRÉDÉRICK

pareil. Parfois, Lisi s’échappait, courait comme une enfant, revenait vite, essoufflée, tenant des violettes et des muguets, tout près de sa bouche, dans ses mains jointes qui semblaient un nid de floraisons ; « en veux-tu, dis ? » criait-elle, et les primevères étaient si proches des lèvres, qu’il ne savait si elle lui offrait des baisers ou des fleurs. La jeune nature éprise s’émerveillait de voir sourire au rire de cette enfant, ce beau jeune homme, un peu pâle, les yeux bleuis d’un rêve pur, et, dans les bruissements des feuilles, dans les fuites chantantes des ailes, tout se fiançait, les branches reverdies et les oiseaux revenus, autour des deux fiancés.

Pourtant, si doux et si tendre qu’il fût, Lisi s’étonnait toujours de lui, un peu. Il était singulier encore, quoique charmant. Il lui dirait d’ardentes choses, presque terribles, tant elles, étaient étranges. Comme naguère il l’avait parfois entraînée à travers les bois et les roches, furieusement, il l’emportait à présent dans des rêves si hauts qu’elle s’y sentait prise de vertiges, et qu’elle avait peur vraiment. Pourquoi s’inquiétait-il de tant de chimères lorsqu’ils avaient tant de joies réelles ? Puisqu’il est si exquis de