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FRÉDÉRICK

enfonce dans du sable, il glissa dans le sommeil.

Quand il s’éveilla, le grand jour allumait le ciel, et, sur la cime, dans le clair espace, les arbres tout remués d’oiseaux en querelle éparpillaient des étincelles de rosée.

Après un regard incertain sur les choses environnantes, il se souvint tout à coup ! Oh ! la fille et le garçon sous la voûte de roseaux, et l’humanité entière pareille à ces deux brutes ! Il courut à son cheval qui, s’étant relevé enfin, broutait la mousse rase du rocher. Plus loin, être plus loin, c’était ce qu’il fallait, avant tout ! Mais, le pied dans l’étrier, Frédérick ne sauta pas en selle : Pour s’échapper de la vie, où irait-il ? où se cacherait-il, pour se dérober au trône ? Certes, il lui serait impossible de séjourner parmi les ordures de la réalité : mais comment, étant homme par la forme sinon par l’âme, répudier la promiscuité humaine ? L’alouette, qui s’est un instant posée sur un tas de fumier, bat de l’aile et s’envole ; les vers y séjournent, contents. Pourrait-il s’envoler, lui, ver aussi, sans aile ? Est-ce que le ciel existe pour ceux qui sont destinés à ramper ? Ainsi, pas un refuge hors du monde ? Hélas ! toute évasion impossible ?