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FRÉDÉRICK

ce qui existe prédispose à admettre ce qui ne saurait exister. Plein d’une religieuse stupéfaction, il tomba sur les genoux, et fermant ses yeux éblouis en même temps que s’ouvrait son âme extasiée, il se mit en oraison.

Il ne comprenait, il ne voulait comprendre qu’une chose : une réponse lui était donnée. Il avait demandé : « Où fuir la vie ? » Jésus s’offrait, comme pour dire : « En moi ! » Aux hésitations désespérées d’un homme, le Dieu confrontait son exemple ; lui aussi, le fils d’une vierge, il méprisait la chair ; et son royaume n’était pas de ce monde. Avec des prières d’enfant et des élans de jeune homme, Frédérick projetait tout son cœur vers la divinité fraternelle ! Comme elle il traverserait le lieu et le temps, sans se souiller aux choses ; il haïrait son corps, le materait, le vaincrait, et s’en dépouillerait enfin comme d’un haillon sordide, plein de poux, qui voile et gêne la pure nudité de l’âme. L’esprit du mal pouvait l’emporter sur la montagne et lui offrir toutes les gloires de la terre ; il n’aspirait qu’aux chastes délices du ciel. Il irait par les chemins, mendiant sans asile, disant des paraboles aux pauvres et aux désespérés,