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FRÉDÉRICK

ni des libertins de profession, ni des filles ; leur débraillé s’originalisait d’une délicatesse précieuse ; gais sans doute, grossiers, non ; la griserie n’est pas l’ivrognerie. Il restait, dans l’encanaillement joli des femmes, comme un air de cour encore, et un peu de cette hauteur dédaigneuse qui est la coquetterie de la chute ; plus d’un homme, la cravate à demi défaite et les yeux allumés de champagne, ne se départait pas d’une courtoisie très apparente, où le sans-façon était une grâce de plus. Évidemment, tous ces convives, riches peut-être, nobles sans doute, des gens du monde, comme on dit, se connaissaient depuis fort longtemps, avaient l’habitude de se trouver ensemble — de si loin qu’ils fussent venus les uns vers les autres ; et de cette habitude, qu’avait dû former un même genre de vie ou quelque communauté de pensées, était née enfin une camaraderie familière, excluant la morose étiquette. Quant à l’opinion que l’on pouvait prendre d’eux, ce n’était pas à Oberammergau qu’ils devaient s’en soucier ; et il était probable qu’ailleurs même ils ne s’en seraient pas inquiétés ; soit qu’ils fussent d’un rang à imposer silence ou à dédaigner les parleurs, soit qu’ils